
Victorine de Oliveira
Portrait | 18 juillet
, mis à jour le 26 juillet
Des pyramides d’Égypte aux icebergs de l’Arctique, en passant par le Taj Mahal ou l’Arc de triomphe, rien ne semble intimider Gerry Hofstetter et sa cinquantaine souriante. Certes, le poids de l’histoire compte, mais c’est avant tout le contact humain qui l’inspire. « J’étais dans un taxi conduit par un Turc à Berlin, se souvient-il. Je lui demande si tout va bien dans la capitale. Il me répond que non, que trop de gens s’installent là pour profiter… Bref, qu’il faut reconstruire le mur ! J’étais interloqué, mais je tenais mon idée pour l’illumination de la Porte de Brandebourg : des briques pour rappeler la fermeture, la division, tout en laissant le vide des cinq ouvertures. »
Discussions et rencontres sont au cœur de son travail. Qu’il s’agisse d’un prêtre à Washington ou d’Inuits, « partout dans le monde vous trouvez la même inquiétude : que l’autre vous comprenne et vous prenne au sérieux. » Ce talent d’écoute et d’observation lui vient-il de ses débuts dans la finance ? Dans les premiers temps de sa vie professionnelle, Gerry avait en effet évolué dans l’univers feutré des banques d’investissement suisses. « J’ai eu envie de toucher de mes mains le fruit de mon travail. Le secret bancaire, ça n’a qu’un temps », plaisante-t-il.
De la lumière comme moyen d’expression
De l’ombre des placements fructueux à la lumière comme moyen d’expression ? « Nous avons tous besoin d’eau, d’oxygène et de lumière. Elle est la seule énergie que l’on puisse voir, contrairement à l’électricité, au vent. Je dois une grande partie de mon succès à ce matériau qui touche à l’inconscient de chacun », analyse-t-il, modeste. Un trait de caractère qui le pousse à se concentrer sur la dimension collective de son art.
Pas d’installation sans un travail d’équipe, quand bien même Gerry est capable de piloter un hélicoptère pour illuminer les sommets des Alpes. Être à plusieurs se révèle même vital lorsque les événements prennent un tour dangereux, voire « surnaturel ». Gerry frissonne encore au souvenir de ce jour d’avril 2012 : alors qu’il navigue avec ses collaborateurs dans les eaux de l’Arctique à la recherche d’un iceberg où projeter l’image du Titanic disparu cent ans plus tôt, un brouillard givrant emprisonne son bateau. Frayeur qui laisse place quelques instants plus tard à l’émerveillement de voir surgir « une montagne de glace de 600 mètres de long, plate comme un écran de cinéma ! C’est Dieu qui l’avait posée là ! »

Gerry Hofstetter
Dans un monde où « nous sommes sans cesse sollicités par nos emails, sms, et alertes », le travail de Gerry invite à la contemplation mais aussi à la réflexion. « Ceux qui m’appellent pour projeter le logo de leur entreprise n’ont rien compris à mon travail », soupire-t-il. Il répond fréquemment à des commandes, gère une agence événementielle et une société de production de films, mais ne met pas ses projets personnels de côté. Le prochain ? « Au Mont Kilimandjaro, projeter l’image de réfugiés sur un glacier en train de fondre. Il y en a plus à cause du changement climatique que de la guerre : je veux le montrer. » Une vision qui attend encore les lueurs d’un financement pour devenir réalité.












