J'étudie la couleur de l'océan
Embarqué dans une mission scientifique à bord de la goélette Tara, Nils Haëntjens, jeune océanographe, sonde les mystères du plancton.

Nils Haëntjens, ingénieur en système embarqué et étudiant chercheur en océanographie, témoigne de son expérience à bord de la goélette Tara où il a eu la chance d’embarquer dans le cadre d’une expédition scientifique en Méditerranée.
Les corvées à bord, c’est pour tout le monde !
Tara n’est pas un navire de recherche comme les autres. Sa spécificité, c’est la diversité des personnalités et des corps de métier qui constituent l’équipage. On y croise des marins, des scientifiques, des artistes et des journalistes.
Une goélette, ce n’est pas fait pour dormir. Les journées comme les nuits sont bien remplies, et même si Tara est conçue pour naviguer dans des conditions extrêmes, tempêtes et bourrasques tirent régulièrement l’équipage de son sommeil. Chacun a sa spécialité, mais tout le monde participe aux manœuvres, aux opérations scientifiques et aux tâches ménagères.

Pour étudier les océans, la goélette Tara navigue sur les mers du monde
Pendant les escales l’équipage joue un rôle pédagogique. Je fais visiter le bateau, je raconte son histoire, j’explique aux plus jeunes les expériences scientifiques que nous réalisons pendant les expéditions, tout en sensibilisant les plus âgés à l’empreinte humaine sur l’environnement et les océans. Ainsi, la priorité demeure la science et la communication sur ses découvertes.

Tara
Les marins doivent assurer la maintenance des instruments scientifiques. Ils se relaient à certains moments-clés, appelés « stations », pour effectuer de multiples mesures (physique, chimique et biologique) et prélever des échantillons dans la colonne d’eau (entre la surface et plusieurs centaines de mètres de profondeur).
Ces travaux peuvent durer de quelques heures à plusieurs jours. Les prélèvements sont conservés pendant le reste de la mission en suivant des protocoles stricts, jusqu’au retour sur la terre ferme où ils seront analysés en laboratoire.
J’étudie la couleur de l’océan
Marin le matin, électricien le midi et apprenti scientifique le soir : c’est la cadence de mes journées en mer. Ma mission à bord est très poétique : je dois « étudier la couleur de l’océan » ! Ça consiste à examiner les propriétés optiques des océans, leur couleur, la façon dont la lumière s’y propage et y est absorbée.
En ce moment, je m’occupe de la calibration d’instruments optiques qui tournent en continu, comme le fluoromètre et le backscattering, qui servent à estimer la concentration de chlorophylle et de carbone organique dans les océans. Ces données sont directement liées à la biomasse de phytoplancton.
Le phytoplancton est très utile : il produit la moitié de l’oxygène que l’on respire, et fait rouler les voitures, car après des millions d’années passées au fond des océans, il se transforme en pétrole. Et il nous nourrit aussi, car il est la base de toutes les chaînes alimentaires océaniques, et on en avale une gorgée à chaque fois qu’on boit la tasse !

Le plancton est composé de multitude d'organismes, entre animaux et végétaux
Quant au zooplancton, tous les ans, sa population « bloome », elle fleurit, et sa concentration est multipliée par plus de dix pendant plusieurs jours. Ce phénomène ne s’explique pas entièrement, et c’est le but de la mission NAAMES, à laquelle je participe, de mieux le comprendre. Tara a déjà réalisé le premier « état des lieux » des océans, et les données collectées dans les prochaines années nous permettront d’estimer l’état de santé du plancton.
Courants violents à Gibraltar
Les voyages au long cours de Tara m’ont aussi fait découvrir des terres et des cultures que je ne connaissais pas : Tanger, Alger, Bizerte, Beyrouth... Je me souviendrai toute ma vie de l’arrivée aux aurores dans le port fortifié de La Valette, à Malte, et plus encore du passage du détroit de Gibraltar. La différence de densité, de température et de salinité entre les eaux de l’océan Atlantique et celles de la mer Méditerranée provoque des courants très violents, que les dauphins remontaient avec grâce.Ce qui fait la richesse de ces expéditions, c’est qu’elles sont partagées, avec des hommes et femmes de la mer, de la science, des arts, mais surtout avec des personnes qui savent donner un sens à ce qu’ils entreprennent. Tara, c’est vraiment une formidable aventure humaine.
Pour en savoir plus
L’expédition TaraLa chaîne Youtube de Tara Expéditions
Les chroniques du plancton
Les résultats des précédentes expéditions Tara publiés dans le magazine Science
Les organismes partenaires de Tara




